Aujourd’hui je souhaitais vous parler d’une femme pour qui j’ai énormément d’affection et d’admiration. Un p’tit bout de vie, très discret, mais ô combien souriante, disponible, serviable… malgré le fait qu’elle ait pu vivre dans sa chaire l’injustice de ce monde. Elle fait partie des femmes de la rue avec qui j’ai vécue à Londres.

Elle s’appelle Fifi et vient d’Erythrée. Un petit bout de femme toute mince, couleur chocolat, de 29 ans. Elle m’a expliqué que dans son pays, si on souhaitait aller à l’université, on devait faire un service militaire de trois mois et suivre une partie de ses études au même endroit dans le camp militaire situé dans le désert. Elle avait tellement envie de faire des études qu’elle a accepté ces conditions et a obtenu un diplôme d’ingénieure. Suite à ça l’armée lui a demandé de donner des cours de maths et de physique dans ce camp. Et lors d’un cours qu’elle donnait, elle imagine qu’elle a dit quelque chose qui n’a pas plu au gouvernement alors elle a été emprisonnée sans jamais connaitre le motif exact de son incarcération. Au bout de six mois, avec l’aide de sa famille, elle s’est échappée et a rejoint le Soudan où elle a travaillé pendant six mois en tant qu’assistante d’architecte et ensuite a rejoint l’Angleterre le 2 juillet 2015. D’ailleurs, son cousin qui l’a aidée à s’échapper a été emprisonné peu de temps après son exil.

Quand elle était encore dans son pays d’origine, elle a été mariée de manière traditionnelle à un homme dont elle n’était pas amoureuse et par conviction personnelle, elle ne souhaite pas être mariée une deuxième fois. Alors aujourd’hui elle imagine peut-être que lui la rejoindra ou qu’un jour elle pourra rentrer au pays. Mais ça doit être tellement étrange d’appeler « mari » quelqu’un qu’elle doit à peine connaitre. C’est le genre de personne dont j’étais à 10 000 lieux d’imaginer le passé. Car si vous la connaissiez… toujours la première à se proposer pour rendre service, la dernière à partir les jours de grand ménage. Et tellement humble, tellement douce, tellement reconnaissante envers la vie. Elle a encore des rêves plein la tête pour son avenir, mais surtout une envie d’avancer, de se réconcilier avec son passé, avec elle-même pour que la maison de Londres où elle séjourna trois mois soit synonyme de nouveau départ. C’est une perle cette fille, vraiment je l’admire tellement !

Alors oui je suis la première à ne pas aimer les histoires où les personnes paraissent incroyablement et parfaitement données aux autres alors qu’elles en bavent 100 fois plus que nous. Mais pour une fois j’avais tout de même envie de valoriser cet exemple de courage, et que cette sensibilisation à la souffrance d’autres pays nous invite toujours plus à la gratitude envers notre situation occidentale.

Musique d'illustration : Mental - Grand Corps Malade

Crédit photo : 1/ Dharm Singh. Edited

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