Vivre sans téléphone et sans montre (ou presque)

L’autre jour, je suis partie en retraite spirituelle, et j’ai eu la surprise en arrivant que les organisateurs demandent mon téléphone et ma montre. Le mobile, je n’ai aucun problème à le donner. Mais la montre…argl ! Ce moment où il m’a fallu détacher ma précieuse source de renseignement m’a fait réaliser combien j’étais attachée à cette information du repère dans le temps. Finalement, après ces 48h incroyables, je n’avais aucune envie de rallumer mon téléphone et de retrouver ma montre. Je les ai donc confiés à un ami qui me les a rendus quelques jours plus tard. Et cette période sans montre et sans téléphone a été l’occasion d’un tas d’apprentissage :

Vivre sans l’heure c’est vivre hors du temps. C’est accepter de ne pas avoir le contrôle sur les événements et de ne pas tout savoir. C’est se libérer de la pression des deadlines horairesques. C’est écouter son corps et ne pas se culpabiliser sur les horaires car « tu devrais te coucher tôt sinon… », « tu ne devrais pas manger à cette heure-là car ça n’est pas encore le moment »…

Vivre sans téléphone, c’est être présent là où l’on est à l’instant T. C’est ne pas chercher à être ailleurs, ou à combler le vide et l’ennui avec les multiples possibilités qu’offrent un téléphone. C’est vivre un voyage en train en regardant le paysage, aiguiser ses sens et prendre plus conscience de son environnement. C’est se sentir un peu rebelle, face à ces rangées de personnes sur un banc tous rivés sur leur écran. C’est vivre dans un autre monde, dans un autre temps. C’est se sentir libre. C’est ne pas se sentir à la merci de la première interruption à cause d’une notification. Ça permet de pas se sentir obligé d’être disponible tout le temps. C’est se dégager du temps pour soi, pour être rien qu’avec soi. C’est ne pas se sentir envahi par un nombre incalculable d’informations et se remettre à faire des to do list sur papier. C’est accepter de ne pas avoir une réponse tout de suite, à l’heure où les sms ou Google nous donnent toutes les informations que l’on souhaite en temps réel. (Je vous renvoie d’ailleurs à l’article « La beauté de ce que vous ne saurez jamais »). C’est demander l’aide de quelqu’un d’autre quand un coup de fil doit être passé et ainsi entrer en communication avec quelqu’un en réel avant de passer au plus virtuel. C’est demander son chemin dans la rue si on a un doute sur la direction. C’est vivre dans un plus grand silence, sans possibilité d’écouter de musique sur les trajets ou de parler à quelqu’un. Lorsque l’on vit seul, c’est avoir le courage d’affronter le vide de sa vie et apprivoiser la vraie solitude, sans cette possibilité d’entretenir un contact avec un autre grâce à cette nouvelle technologie.

Alors c’est vrai que cette petite aventure demande quelques changements qui paraissent improbables au début pour une vie normale en société. Car pas de téléphone pour moi veut dire pas de réveil ! (et j’admets que tout le monde ne peut pas se permettre de ne pas avoir de réveil sans qu’il n’y ait pas de risque d’arriver après 9h30 au boulot). Ça veut dire aussi ne pas savoir quand part le train le matin, et quand il n’y en a que deux par heure, ça implique de potentiellement attendre une demi-heure si un train vient juste de partir (et ça entraine à la patience).

Suite à cette expérience de quelques jours, je l’ai reproduite à plus petite échelle sur une soirée en laissant les deux objets au bureau avant de partir. C’est vrai qu’il est difficile de trouver des jours où il est possible de le faire car ça implique de ne pas avoir de rendez-vous le soir, d’amis à retrouver de manière pas organisée, ou de réunion à 9h le lendemain matin. Mais ça vaut le coup. Au moins un soir par semaine, ça ne donne pas l’expérience aussi profonde que plusieurs jours, mais ça permet une petite coupure et de retrouver tout de même quelques avantages cités. Ça aide à simplifier sa vie, à revenir à l’essentiel, à se resituer sur son axe intérieur. Ça permet de questionner son rapport aux objets et à ce qu’ils permettent (rapport au temps, aux autres, aux activités,…). Alors si vous en avez la possibilité (et il y a beaucoup plus de fausses excuses que de vrais obstacles à cette expérience), je vous le conseille vivement !

Musique d'illustration : We are the free - Matt Redman

Crédit photo : Austin Neill. Edited.

Le blog Bienheureuse Vulnérabilité est absent de tous les réseaux sociaux. Pour être tenu informé(e) des articles récents, abonnez-vous à la newsletter ici ou sur la colonne de droite. Juste 1 mail par mois, pas de spam, ni de transmission de votre adresse à un tiers, promis ! 🙂

2 Comments

  1. Ch'tite Breizh

    24 janvier 2019 at 7:02

    Ca me tente carrément d’essayer ça sur un week-end!! 😀
    Le téléphone ça me dérange pas du tout mais effectivement la montre c’est autre chose…
    Il existe maintenant dans certaines crèches des journées sans horloges et je trouves ça top pour vraiment être dans le respect du rythme de chaque enfant!

    1. Bienheureuse Vulnérabilité

      25 janvier 2019 at 11:27

      Je te le conseille vivement comme expérience personnelle !
      Et tu viens de m’apprendre quelque chose pour les crèches 🙂

Répondre à Bienheureuse Vulnérabilité Cancel

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.